Terres de Weyard
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Terres de Weyard


 
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 Entre temps.

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Shiva

Shiva


Messages : 36
Date d'inscription : 23/08/2010
Localisation : Désert de Sianna

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MessageSujet: Entre temps.   Entre temps. Icon_minitimeSam 20 Oct - 1:47

Entre temps.

La pluie tombait doucement, lavant les gravats imbibés de suie, et d’une manière générale, tout ce qui tenait encore debout.  De la fière citée avant-gardiste de la côte ouest, il ne restait qu’un vague cimetière de  bitume déchiqueté, sur lequel trônaient des gratte-ciels fendus qui reflétaient la lumière timide comme autant de miroir brisés. Témoins silencieux de la violence des évènements de la veille, ils donnaient au paysage une vision apocalyptique taillée dans le vif, une fin du monde urbaine.  

Ils avaient marchés longtemps sur les routes défoncés, jonchées de morceaux de verre, esquivant les différents reliquats des pièces à vivre et autres bureaux qui s’étaient soudain retrouvés éclatés sur le sol. A un certain moment ils s’étaient même retrouvés à passer sous une arche d’un nouveau genre : un des plus haut gratte-ciel du quartier des affaires avait vu sa base tellement attaquée qu’il était venu s’encastrer dans la tour voisine qui lui était seulement séparée par le boulevard. Sans se soucier du risque d’effondrement,  ils traversèrent ce triste chef d’œuvre de désolation dans une chute de cendres et de poussière à l’aspect vaguement neigeux. C’est dans le quartier résidentiel, celui de leur enfance, qu’ils l’avaient finalement retrouvée, inanimée.
Matt laissa le garçon aux cheveux oranges prendre le corps de sa sœur dans ses bras, et prendre son pouls : elle était inconsciente mais vivante. De peur, de soulagement ou de tristesse, il enfoui son visage dans ses longs cheveux blonds et se laissa submerger par les larmes. Matt serra le poing et contempla le ciel d’un regard sombre, trempé par la pluie. Il jura, à mesure que le tonnerre déchirait l’atmosphère, qu’il leur ferait payer chaque seconde de deuil, chaque sacrifice au centuple.


« Matt ? »

« Hey réveille-toi ! »
Etant venu à bout de sa bien maigre patience, le refus d’obtempérer de son original ne lui laissa pas d’autres choix : Shiva prit un sceau d’eau qui trainait près de l’abreuvoir et en balança le contenu sur le jeune homme. Derrière les prévisibles râles, et autres expressions gutturales faisant plus ou moins de sens, la fillette reconnue tout de suite ce qui se cachait derrière les yeux encore à moitiés endormis de son comparse.
« Tu en rêves encore ? » Demanda-t-elle en croisant les bras, mi- intriguée, mi- ennuyée. L’autre se redressa et posa son dos contre le mur en planches de bois dans un soupir.
« Je ne peux pas tout le temps fuir ce genre de chose, Shiva. » Il la regarda : baignée dans la lumière vive que lui procurait la seule entrée de la petite cabane en bois qui leur servait de refuge, elle lui apparaissait en contre-jour. Il avait du mal à distinguer son visage mais sa posture lui suffisait amplement, elle semblait fragile mais dense, et sous les vêtements devenus bien trop grands pour elle il pouvait encre deviner les muscles épais forgés dans la douleur et le sang. Devant son silence et la faible envie d’emmener la conversation plus loin dans ce sens, le jeune homme décidait de passer à autre chose.
« Au fait il est quelle heure ? » demanda-t-il en se débarrassant du surplus de paille qui s’accrochait encore aux vêtements déchirés qui l’habillaient tant bien que mal.
« Je n’en sais trop rien, j’ai pas vu d’horloge. Allez lève-toi je t’attends dehors, à l’entrée de la ville » Répondit-elle sèchement  en retournant sur ces pas.
Matt se leva dans un soupir et se dépoussiéra brièvement. « Dictatrice en culotte courte » grogna-t-il pour lui-même, avant de sortir à son tour.
Le bref éblouissement passé, il prit soin de laisser l’air frais emplir ses poumons d’une saveur d’herbe des champs…et de purin. Il se couvrit le nez en urgence devant la soudaine attaque aero-nasale, fourberie de son environnement direct. La ville la plus proche où le marchand et son fils pouvaient les transporter ressemblait de près ou de loin à une de ces villes en bois du far-west. Le genre de patelin desséché ou pas grand-chose ne pousse.
Le quartier entier était construit dans un boit sec, presque cassant, plein d’écharnes, le sol était en argile sec et volatile qui semblait se battre en permanence avec le sable du désert  situé au sud qu’ils avaient laissé quelques heures auparavant. Rejoignant l’artère centrale du patelin il constata qu’elle était étrangement vide,  à l’exception de deux-trois personne et d’une charrette poussive à la mécanique usée et grinçante.
« T’es enfin arrivé, t’as pris ton temps ! » Elle se tenait là, adossés à une poutre verticale qui maintenait le porche du bar local. Le visage à moitié enfouis derrière son écharpe et le col roulé de son pull devenu bien trop grand pour elle, ses yeux bleus électriques le dévisageaient comme si ils appartenaient à un animal sauvage. Sans transition elle sortit brièvement un papier de sa poche et le déplia, puis fit signe à Matt de s’approcher.
« Nos amis les anges nous ont laissés un petit cadeau » dit-elle avec un sourire narquois quand il arriva à son niveau.  « Devine ce que c’est »
« Une carte ? » Répondit-il après un rapide coup d’œil  au document. En effet les contours de quelques continents semblaient avoir été tracés de manière parfaite, il y avait même une petite flèche qui semblait indiquer le nord, il fit rapidement le lien avec l’énigme qui avait été gravé dans leur mémoire.
« Ça aime les jeux de piste les anges ?
- Je n’en sais trop rien, je pense que c’est plutôt une manière pour eux de se distraire, ou de nous mettre à l’épreuve. Peut-être les deux. » Elle gloussa « Je vais devenir la première comédienne à anéantir son public.  »
Elle replia prestement la petite carte et se tourna vers son autre. « Allez viens, j’ai envie de manger un peu » puis sans attendre elle se dirigea vers l’intérieur du porche qui semblait abriter une taverne. Matt se précipita pour revenir à son niveau.
« Attend, on va payer avec quel argent ?
- on a reçu l’équivalent de 200 unités de monnaie locale, je sais pas comment, je sais pas pourquoi, c’était avec la carte et une herbe à la con –oui j’ai fouillé dans tes affaires ne me regarde pas comme ça.  
- Comment on sait si leur nourriture n’est pas toxique pour nous ? Tu vas trop vite là. »
La fillette s’arrêta pile devant la porte à double battant dans un pur style western, avant de la pointer du doigt, l’air agacée.
« Ecoute Matt, ces gens marchent sur deux jambes, parlent notre langue, respirent le même air, et ont les mêmes foutues mêmes habitudes que nous. Si on suit la logique ils devraient manger à peu près pareil non ? Alors arrête de faire ta gonzesse et estime toi plutôt heureux qu’on n’ait pas fait une rencontre du troisième type ! »
Sur ces paroles elle s’empressa de passer la porte énergiquement. Matt lui prenait le temps d’assimiler ces dernières paroles, avant de prendre l’entrée à son tour. « …Une gonzesse ?  Non mais je rêve là !»
L’auberge en question se composait en fait en deux parties, l’une d’entre elle contenait toute la partie restauration, avec des literies à l’étage, le plus souvent utilisée par les voyageurs de passage. L’autre –la plus populaire semblerait-il- prenait la forme d’un petit barre miteux mal éclairé presque exclusivement composé  de bois. Le genre de rad un peu crade et assez mal fréquenté, à la vague odeur de bière et de sueurs mal ventilée typique de ce genre de coin. La grosse majorité des clients portaient une paire entre les jambes, le coin n’étant manifestement pas très porté sur la parité. Le grincement de la porte à double battant était déjà bien trop fort pour un Matt de nature discrète, annonçait l’arrivée en grande pompe d’une fillette au vêtements bien trop grands pour elle et d’un grand maigre aux cheveux longs vêtu bizarrement -jean de Shiva qui faisait très « slim » sur lui  qinsi qu’un de ses t-shirt qui laissait paraitre son nombril, l’ensemble faisait très…original, pour ne pas dire carrément tantouze. Les tatoués, les barbus, les moustachu, les poilus et les gros bourrins de base qui avaient laissé leur épée/tromblon posée à côté de leur chopines se retournèrent dans un silence inquiétant. Cela revenait à dire que toute la salle s’était interrompue à leur arrivée, pour faire simple. L’un des plus gros sacs de testostérone à qui il n’aurait manqué que la Harley pour compléter sa panoplie du parfait berserker irlandais se mit à rire grassement à la vue de ces deux étrangers bien frêle, l’ensemble de la salle suivit le mouvement l’espace de quelques secondes,  mais très vite tous retrouvaient le chemin de la chope, sans néanmoins perdre une seule seconde de ce qui allait se passé avec ce duo inhabituel.
Matt avait des sueurs froides. « Bienvenue à médiéval beaufland » se dit-il dans un soupir, puis du coin de la bouche il chuchota « on se casse d’ici » à Shiva qui manifestement n’avait pas envie de l’écouter, elle se dirigea au contraire vers le barman qui semblait au moins tout aussi épais et carré que l’armoire à glace posée derrière lui.
« Qu’est-ce tu veux ? On ne sert pas les mômes ici. Reprend la main de ta grande sœur et rentre chez toi. » Il n’en fallait pas plus pour déclencher une nouvelle hilarité générale, mais Shiva n’en démordait pas. Elle s’avança un peu plus près du comptoir, avec un regard qui disait clairement « encore une remarque de ce genre et j’enfonce ta tête entière dans l’une de tes choppes dans la casser, chiche. »
Elle prit une grande inspiration et annonça d’une traite « je veux un café long avec du lait de soja parfumé au caramel avec des pépites d’amande avec un sucre, pas du faux, et vite ! »
Silence du barman. Silence de la salle. Grand silence, bien lourd.
Matt serrait les dents « Ça craint, ça craint méchamment » se disait-il. Il ne s’inquiétait pas tellement pour Shiva mais pour les personnes qui se tenait autour d’elle, car déjà impulsive de nature, quand elle n’obtient pas ce qu’elle veut elle a tendance à devenir très rapidement…colérique. En un battement de cœur il devina ce qu’il allait se passer : un nouveau rire gras du barman, l’hilarité de la salle, la colère de Shiva et finalement…le drame. Le premier avait à peine sourit que la jeune fille se fit prendre par le poignet et conduite dehors, laissant la salle se gausser une nouvelle fois à peine la porte à double battant fermée. Shiva repoussa violemment son comparse et lui jeta un regard furieux avant de se diriger vers l’entrée pour balancer le carnage promis.
« Tu veux vraiment faire ça ? On vient juste d’arriver en ville et tu t’attires déjà des problèmes » Dit Matt en lui bloquant le passage.
« Dégage Matt, ces espèces de porcs n’ont qu’à se tenir à carreaux devant moi ! S’ils sont trop cons pour le savoir, je vais leur apprendre. »
Son autre monta le ton à son tour : « T’as pas vu les avis de recherche à l’entrée ? Certains ont leur tête mise à prix pour moins que ça ! Si tu n’es pas capable de mettre ta fierté de côté on est pendu dans moins d’une semaine à ce rythme-là. C’est comme ça que tu exécutes des missions d’infiltration ? Je me demande pourquoi ton créateur t’as envoy- ouf ! »
Matt s’écroula au sol la main sur le ventre, Shiva ramena son poing vers elle et le regarda reprendre son souffle. Le jeune homme lui lança un regard meurtrier, tel qu’elle eut l’impression de se regarder dans une glace l’espace d’une seconde. Elle savait exactement ce dont elle avait besoin maintenant.
« Si tu m’en veux de t’avoir frappé, viens me voir à l’entrée de la ville, je t’y attendrai ». Dit-elle avant de tourner les talons et de s’éloigner.
Matt vomit un peu de bile avant de reprendre son souffle. « Sale garce ! »
Quelque part entre les pointes de douleur il se surprit lui-même à sourire, il avait réussi à blesser une des rares choses qui pouvaient atteindre Shiva : sa fierté.
Une paire de pieds virent occuper son champ de vision et une main vint prendre la sienne avant de le relever doucement.
« Hey, ça va ? » demanda une voix féminine.

Matt releva la tête : la propriétaire de la voix et de la main se tenaient dace à lui. Une jeune femme de son âge en apparence, plutôt frêle, les vêtements sales, le haut de sa tête couvert d’une sorte de chapka en tissu épais. Des yeux vifs couleurs… rose bonbon ? Étrange personnage.
« Hum, merci » dis Matt timidement.
- « Pas de quoi »dit-elle en lui lâchant la main « je travaille comme serveuse dans ce bar, je viens de terminer mon service. J’ai tout vu. On aime pas beaucoup les étrangers par ici vous savez, c’est une petite bourgade, tout le monde se connait, ceux qui ne font pas parti de notre communauté sont trop souvent synonymes d’ennuis.
- Classique… »  répondit Matt en se dépoussiérant.
- « Je m’appelle Nelyn, Nelyn Archer.  Mais fais comme tout le monde et appelle-moi juste Nel.
- Matthew Noregan, Matt pour faire simple.
- Bien Matt, sans vouloir me mêler de ce qui ne me regarde pas, ta sœur à l’air d’avoir un sacré caractère.
- Ma sœur ?
- Oui, la fillette qui t’a frappée, c’est ta sœur non ? Je me trompe peut-être ?
- Oui, non… enfin oui, c’est ma sœur, enfin on peut dire ça oui…
- Qu’est-ce qu’elle a ?
- Rien. Je vais la laisser se calmer un peu. C’est juste qu’on débute un long voyage et qu’on a rien. Pas de vêtements, pas d’argent, pas de provisions. … »
Elle considéra Matt un moment.
« Oui pour les vêtements je suis d’accord, il y’a un problème… » dit-elle en riant à la vue des vêtements ultra serrés que porte le jeune homme. « Mais si c’est pour l’argent, je peux t’aider. J’ai du travail à te proposer.
- Quel genre ?
- Le genre que toi seul pourrait faire. »
Un peu hésitant Matt prit quelques secondes pour réfléchir, mais au fond il connaissait déjà la réponse à l’instant même où la question lui était posée.
« Je suis partant. » Dit-il simplement  Nelyn se contenta de sourire et de lui prendre à nouveau la main pour l’emmener.
Après quelques minutes de marches dans les rues étroites et poussiéreuses de la petite ville, Ils arrivèrent devant un grand atelier qui emblait à l’abandon. Matt remarqua tout de suite qu’il devait être le seul bâtiment du coin qui ne soit pas en bois, il était en fait construit en pierre blanche et mate, Salie par la poussière et  la pluie. Au-dessus de la large entrée se distinguaient encore les quelques mots en peinture délavée : « Tarem forge et arsenal ».
« Bienvenue chez moi ! » Annonça Nel d’une voix enjouée.
- « C’est chez toi ça ?
- Oui, rentre, je vais t’expliquer. »
Ils passèrent ensemble la large porte d’entrée en bois. L’intérieur ressemblait en effet à une forge, avec son haut fourneau et ses multiples tables de travail pour façonner le métal. Malgré que les équipements semblaient provenir d’un autre temps pour Matt, il semblait évident que les outils disposés çà et là devaient servir à l’élaboration d’un travail hautement sophistiqué, d’une mécanique de pointe.
Nel s’approcha du haut fourneau et passa sa main sur la poussière qui recouvrait une de ses immenses surfaces, avant de la secouer. Elle continua de faire le tour de l’immense espace de travail.
« L’âge d’or de cet endroit remonte à la grande guerre » dit-elle en faisant signe à Matt de la suivre. « À l’époque mon père était directeur de cet atelier, il y fabriquait des armes et des armures qui étaient réputées sur tout le continent. Nous avions des commandes en provenance de nombreuses villes, et mêmes quelques particuliers assez fortunés, la ville battait alors de son plein. C’était une époque très différente d’aujourd’hui… »
Elle l’avait conduit au niveau supérieur de l’atelier, sur une plateforme qui surplombait l’immense cuve conçue pour garder le métal en fusion, désormais vide. Elle s’accouda sur l’un des remparts de sécurité au bord de la cuve et continua :
« …Et puis la guerre s’est terminé et les commandes se firent de plus en plus rare, la ville tomba bientôt en disgrâce. Mon père qui s’était épuisé pendant cette période intense n’a jamais eu la force de reconvertir cet endroit. Et puis il est mort… me laissant la gestion d’un atelier trop grand pour moi, et très vite il cessa complètement de fonctionner.
- Pas d’autres parents ? Pas de proche pour t’épauler ? Des amis peut-être…
- Mon père a toujours été seul, il n’avait pas le temps pour autre chose que son travail, c’était un entrepreneur avant tout. Il m’a recueillis enfant pendant l’un de ses voyages pour récolter quelques métaux rares, il ne m’a pris sous son aile que quand il a vu qu’il n’aurait pas à garder un œil sur moi en permanence. Je suis assez débrouillarde… » Elle esquissa un sourire qui dissimulait particulièrement mal l’amertume dans ses yeux. « Quant aux amis, déjà que je ne suis pas originaire de la région, ce qui me vaut quelques méfiances à la base, depuis la fermeture la ville entière me met en plus sur le dos sa misère, ils ont raison j’imagine. L’échec de l’atelier Tarem, c’est avant tout mon échec. Je devrais être heureuse qu’ils aient bien voulu me laisser travailler dans le pauvre bar miteux de la ville »
Elle semblait grave, Matt ne savait pas vraiment quoi répondre. Que dire à cette quasi-étrangère qui vient de lui raconter une tragédie personnelle ?
« …Tu es peut être un peu dure envers toi-même. » Dit-il finalement.
«  Non je ne pense pas. Mais c’est gentil, merci » répondit-elle dans un sourire authentique. « Mais je ne t’ai pas amené pour que tu m’entendes raconter ma vie, je t’ai raconté tout ceci pour que tu puisses comprendre ma requête. Il y a dix ans je n’étais pas en mesure de diriger cet endroit mais j’ai pris de la bouteille depuis, je compte bien remettre l’atelier sur les rails et tu vas m’y aider » Ce faisant elle lui lança un regard qui avait un petit quelque chose de Shiva. « Allez viens » Elle reprit une nouvelle fois par la main « je vais te briefer en même temps que je t’équipe ».
Ils montèrent un petit escalier en pierre qui les mena sur une partie de l’atelier qui ressemblait plus une à une pièce à vivre qu’à une usine, malgré les outils encore disposés nonchalamment, parfois à même le sol. Seul un lit, quelques meubles et un poêle marquaient finalement le contraste avec les autres pièces du bâtiment.
« Désolé c’est un peu en désordre. Viens par ici je prends tes mensurations » Matthew s’exécuta.
« Tu vas devoir t’introduire dans un campement de brigands installé à environs 2 heures de marches au sud-ouest du village, dans le désert. Ils ont commencé à nous racketter il y a environ trois ans, et nous avons plutôt bien tenu jusqu’ici. » Dit-elle en sortant en mètre pour prendre son tour d’épaule et sa taille. « Enlève ton haut. » commanda-t-elle avant de poursuivre : « Sauf qu’il y’a quelques semaines ils se sont introduit dans mon atelier et m’ont volé ce que j’avais de plus précieux : mes magilites.
- Tes quoi ? »
Nel se redressa et le regarda droit dans les yeux, intriguée.
«  T’es pas du coin, toi. » Dit-elle.
- « Non, pas vraiment. »
La jeune femme soupira « c’est un matériau, une roche rarissime aux radiations mortelles qui dégagent une puissance magique hors du commun. On s’en sert pour chauffer les moteurs à vapeur des véhicules comme les trains ou les dirigeables. Les magilites de l’atelier servaient surtout à chauffer le haut fourneau, même si tous les employés avaient pour obligation de maîtriser la magie du feu pour travailler les alliages avec dextérité. Si je veux rouvrir l’atelier et relancer les affaires je dois commencer par là. Dit-elle en faisant enfiler à Matt une côte de cuir léger.
« Et en quoi est-ce si important que ce soit moi qui intervienne ? » Demanda-il en ajustant le vêtement autour de ses poignets.
- « Parce que nous ne savons pas si ce groupe de bandit appartiens à une bande organisée plus large. Nous sommes une petite ville, nous avons trop peur des représailles. Toi, tu es inconnu au bataillon, ton arrivée est une aubaine, même si tu te fais repérer personne ne pourra mettre en cause quelqu’un de chez nous, il faudra faire croire que tu as agis seul. Enlève ton pantalon –fais pas ton timide, je suis une pro.
- Mais, Nel, je ne sais pas me battre. Et si ça tournait mal ?
- Je n’ai jamais dit que ce serait facile, mais il faut prendre ce risque » Dit-elle en s’affairant à passer un pantalon renforcé au niveau de ses genoux. « Et n’oublie pas que tu as une belle récompense à la sortie.
- Oui parlons-en de la récompense, tu me proposes quoi ?
- Tu seras surtout payé en nature maintenant que j’y pense… » Dit-elle au moment même où sa tête arriva à hauteur de l’entrejambe de Matt, qui ne put s’empêcher de faire travailler son imagination.
« …Tu pourras garder tous les équipements que je suis en train de t’enfiler, en plus d’une petite somme pour te payer le train jusqu'à la prochaine grande ville pour toi et ta sœur » Poursuivit-elle.
- C’est assez généreux en fait. »
Nel esquissa un sourire et lui attacha une armure sur le torse. Elle paraissait assez sophistiquée, avec une sorte d’éclat de rubis en son centre qui constitue le centre névralgique de plein de petites gravures qui parcourent l’ensemble de l’alliage.
« Généreux, certes, mais pas désintéressé. » Dit-elle. « Une fois que l’atelier sera relancé je vais avoir besoin de publicité, considère toi alors comme une vitrine ambulante. Tu portes ce que l’on peut faire de mieux dans cet atelier, la « crème » : armure a réduction d’impact magique, portes cartouches intégrés aux avants bras, ainsi de suite…
- Porte cartouche ? Vous faites des armes à feu ?
- Pas tout à fait… » dit-elle en riant. « Viens je vais te montrer. »
Elle le conduit à un placard en fer usé situé à l’autre extrémité de la pièce, qu’elle ouvrit après avoir pris soin au préalable de déverrouiller les trois ou quatre cadenas maintenant l’ensemble sécurisé. Les deux portes s’ouvrirent dans un grincement et d’un simple claquement de doigt Nel alluma les flammes des luminaires qui en éclairaient le contenu depuis l’intérieur. Et quel contenu ! Protégé derrière une glace impeccable, trônait ce qui semblait être un immense revolver à la crosse horizontale et au canon démesuré qui semblait avoir fondu en partie dans une lame longue comme le bras de Matt,  à la forme intimidante et particulièrement soignée. La lame et la partie pistolet de l’arme étaient tous les deux ornés des mêmes gravures en arborescence que celles situées sur l’armure du jeune homme, et une petite inscription « atelier Tarem » étaient élégamment gravé en son flanc.
«On dirait une arme sortie tout droit d’un jeu vidéo » se dit-il en l’observant. Il fallait toutefois se rendre à l’évidence, de tout ce qu’il avait vu jusqu’içi, cet objet semblait de loin le plus perfectionné, c’était une belle arme travaillée avec soin.
« Elle te plait ? » Dit Nel en observant le visage de Matt. « C’est mon chef-d’œuvre, conçue par mon père sur son lit de mort et réalisée par mes soins il y’a quelques mois seulement. »
Elle sortit l’instrument de l’armoire et lui présenta. De plus près le côté hybride de l’arme ressortait encore plus, c’était comme si on avait collé un revolver géant sur une crosse de Winchester avec une hallebarde au bout.
Elle fit mine de mine tendre et au dernier moment l’empoigna sèchement de ses deux mains avant de pointer l’arme vers le mur d’en face. Elle tira trois fois, perçant le mur en autant de trous de la taille d’une balle de golf dans un grand bruit de claquement. Matt resta figé sous la brutalité de son geste, mais avant tout étonné par l’expression neutre voire glaciale de la jeune forgeronne.
“Barillet à six tubes contenant des extraits de magilites appauvries et traitées. Ne nécessite pas le flux de son utilisateur, le système de rotation du barillet assure un refroidissement par air pour une cadence de tir de trente-six coups par minutes. Les charges sont neutres par défaut, mais peuvent être alimentés avec la magie de l’utilisateur, attention aux risques de surchauffe par contre. Les coups atteignent leur cible a milles pieds à coup sûr, pourvue qu’on le tienne correctement - avec ses deux mains.”
Dit-elle d’un ton monocorde et rapide, presque récité par cœur, avant d’empoigner l’arme de manière plus brutale et d’assener un coup de lame ascendant à une vieille chaise qui se fît trancher jusqu’à la moitié de son assise avant d’aller s’éclater contre le mur d’en face déjà troué préalablement.
“...Et ça c’est pour les adversaires un peu trop proches: lame en alliage refondue trois fois, garantie sans impuretés, s’émousse peu, facile d’entretien, tranchante et solide. Tes ennemis tu les découpes en tranches comme si c’était des parts de quiche, héhéhéhé.”
Matt esquissa un sourire “En voilà une manière de traiter ton mobilier”
Nelyn pouffa avant de s’avancer vers le jeune homme et de reprendre un ton plus sérieux.
“Tout sera bon à jeter ici, les meubles, la maison, la forge, le village entier. Tout. Sauf si je refais fonctionner la vieille fonderie, j’ai des plans de nouvelles armes qui peuvent déséquilibrer, voir révolutionner l’art de la guerre tel qu’on le connaît maintenant. Mais tout ça commence par toi.”
Matt se sentit soudainement mal à l’aise, comme si la réalité venait de faire une irruption fracassante dans son esprit. La violence de sa besogne matérialisée par cette arme loufoque que lui tendait la forgeron. Milles pensées semblait lui traverser l’esprit, prendre l’arme, c’était accepter, et accepter c’était un peu se salir non ? Accepter l’idée de tuer des gens alors qu’on n’a pas appuyé sur la détente, consentir et renoncer à ses idéaux. L’argent oui... mais l’argent à quel prix ? Après quelques secondes de silence interminable, il répondit à voix basse, presque honteux:
“Je ne sais pas Nel, tu me demandes de tuer des gens”
La jeune femme à la chapka regarda le sol et se mordit les lèvres avant de pousser un long soupir. Elle s’approcha un peu plus de lui, le coinçant contre un des murs de sa chambre, et lui lança un regard intense.
“Écoute Matt, t’as pas l’air d’être un mauvais garçon, c’est vrais que ce que je te demande est difficile, mais les gars contre qui je t’envoie te battre c’est pas des rigolos. Pillage, meurtre, vandalisme et racket, je ne fais que te raconter la partie la plus propre de leur business. Ces types sont des ordures, oui. Les gens d'ici ont peur, oui.” Elle frappa le mur derrière Matthew de son poing avant de jurer à voix basses “si ça ne tenait qu’à moi je prendrais tout ce que j’avais dans cette foutue usine d’armement avant de leur balancer sur le coin de la figure pour les chasser d’ici, mais je ne peux pas ! Personne ne peut ! Si un seul de ces bandits survit, l’information remontera à la capitale et dans une semaine au plus tard le village est réduit en cendres et nous pendus à son entrée.”
Elle lui tendit l’arme une nouvelle fois. “Tu as besoin de moi et j’ai besoin de toi, ne me laisse pas tomber, pas maintenant. Tout peut repartir, je le sais. J’ai besoin de toi, j’ai besoin des magilites”
Elle lui lança un nouveau regard perçant. “S’il te plaît”
Matt laissa quelques secondes s’écouler, laissant au silence le soin de faire son travail.
“Très bien” Dit-il en attrapant sèchement la crosse de l’arme qui lui était tendue.
Nel afficha un sourire soulagé mais vainqueur:
“Valkyrie.
- Pardon ?
- C’est son nom. Viens je vais te montrer comment la manier correctement” Dit-elle en l’emmenant par le poignet jusqu’au rez-de-chaussée.




Quelques heures plus tard… (Oui l’auteur est une feignasse, faites avec)

Nelyn afficha un sourire complice.

« Bien joué ! » dit-elle en s’approchant de Matt toujours en position de tir, la Valkyrie encore fumante. « Tu as de bonnes bases on dirait, tu as déjà fait du tir avant ? »
Matt abaissa le fut et observa la cible dans son ensemble : quatre coups sur cinq au but, inespéré pour un débutant.
« J’ai pratiqué un peu de tir quand j’étais plus jeune, mais je dois dire que cette arme est vraiment facile à prendre en main
- C’est le but ! » Dit la jeune femme en prenant l’arme d’une main pour la caler sur l’épaule du jeune homme «  par contre fais attention à ta posture, penche toi plus vers l’avant et fais attention à la crosse, il faut qu’elle soit bien calée sur ton épaule. Pour l’instant tu t’en sors, mais dans le feu de l’action je ne donne pas cher de ta mâchoire»
- Je vais me débrouiller » répondit l’autre calmement.
Nelyn haussa les épaules et fit un tour autour de Matt, comme si elle cherchait quelque chose. « Bien, maintenant voyons voir où en est ta magie
- De la magie ?
- T’es vraiment pas d’ici toi, je te parle de ça » Elle lui présenta ses mains jointes avant de faire apparaitre une flamme en leur sein
- « Oh, tu parles de ça ? » dit-il en lui présentant une charge électrique concentrée, à sa manière.
- Tu es donc de type électrique ? Intéressant. Comme tu as pu le voir je maîtrise l’élément du feu. Enfin on verra ça plus tard, faisons une pause si tu le veux bien. »

Ils s’assirent à l’ombre du grand mur qui séparait la grande cour intérieure du reste de la ville. Quelques minutes passèrent.
« Très sincèrement,  je ne sais pas si je vais y arriver, je ne me suis jamais battu. Enfin, pas à mort en tout cas» soupira Matt.
La jeune femme à la chapka pris ses genoux entre ses jambes et regarda le sol.
« On a pas le choix, même les forces de l’ordre de la région nous ont laissé tomber. Apparemment on ne vaudrait même pas d’être sauvé. Il y’a ceux qui sont partis et il y a nous, qui sommes resté pour tenter de sauver le village. Tout ça pour gagner le titre de fous, moi en tête de file. Essaye de te faire aider, mais ici plus personne n’y croit vraiment. »
Matthew s’adossa un peu plus contre le mur et contempla le ciel une minute, pour essayer d’oublier l’idée qui venait de lui traverser l’esprit. Non, il ne ferait pas ça, il ne…et zut.
« Je dois aller voir quelqu’un… » Annonça-t-il, devant le regard interrogateur de Nelyn.  « …Et je reviens. C’est pas comme si je pouvais aller très loin comme ça.»
Elle inclina la tête et pouffa quand le jeune homme fit un tour sur lui-même dans son armure.
« On se revoit ce soir, n’oublie pas que demain nous avons rendez-vous avec mes magilites
- Compris » répondit-il avec assurance. Puis sans un mot de plus il s’éclipsa. La forgeronne mis sa main devant sa bouche, suspicieuse.



Dernière édition par Shiva le Lun 9 Sep - 4:19, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Entre temps.   Entre temps. Icon_minitimeLun 9 Sep - 4:18

Un pied sur le sol qui s’effrite, un rocher au bord d’un océan de granite et de sable, un morceau d’infini jusqu’à l’horizon, et puis enfin elle, impassible sur ce plongeoir de pierre. Les cheveux et l’écharpe au vent, le premier lieutenant rendu dans un corps de fillette attendait, prête.
Elle ne bougea pas d’un pouce quand Matt marcha jusqu’à elle, elle ne prit même pas la peine de se retourner, elle savait. Shiva étant Shiva, elle fut impitoyable, sèche et cassante d’entrée de jeu.
«  Tu en as mis du temps, j’ai cru que tu allais te dégonfler. Au bruit de ferraille que tu trimballes avec toi j’imagine que les bouseux t’ont filé une armure ? Les choses vont vite par ici. »
Matt s’arrêta à quelques pas de son autre et croisa les bras
« Je t’ai connue plus subtile quand il s’agit de faire de la provoque. Tu me frappes, puis tu me demandes de venir, tu m’insultes. Qu’est-ce que tu veux ?
- Ce que je veux ? Ne joues pas au con avec moi Matt, ça ne marcheras pas. Je suis toi -certes en plus classe mais passons. Je ne t’ai pas loupé ce matin, ça doit te faire encore un peu mal à ton gout non ? Tu as toujours été si sensible. »
Matt serra les dents, il passa une main sur son ventre encore douloureux, mais il se ressaisit. Il connaissait trop bien son clone pour s’arrêter à ce genre de provocation, il n’était pas venu pour se quereller, il ne devait pas entrer dans son jeu.
«  Je ne vais pas me battre avec toi – je ne t’accorderais pas ce plaisir. Je vais nous sortir de là. »
La jeune femme n’eut comme réponse qu’un faux rire mesquin. Avant de prendre un visage glacial et meurtrier, exactement comme elle l’avait fait avec Von Asim, nota Matt.
«  Nous sortir de là ? C’est moi qui suis en charge de l’opération, tu n’es qu’une variable improbable qui est venu s’immiscer dans mes plans. Pour ta gouverne, tout se passe comme prévu. »
Elle écarta ses petits bras dans une posture théâtrale en direction de l’infini désert qui s’étalait devant eux.
« La reconnaissance ne fait que débuter, bientôt, tout sera à papa. Tu n’es qu’une gêne de plus, un imprévu, comme mon corps, comme ces soi-disant « dieux » et leur « magie », rien de plus.
- Ne me fait pas rire. »
La remarque atteint Shiva en pleine tirade, ses bras retombèrent mollement aux coté de ses flancs. Elle inclina la tête et regarda Matt comme un animal curieux, jetant un regard froid qui invitait néanmoins le jeune homme à poursuivre. Ce dont il ne se priva pas.
«  Tu es en charge de quoi ? Quel plan ? Derrière les grands airs que tu te donnes tu es aussi paumée que moi. Je le sais, je te connais. Tu n’as jamais fait que jouer au petit tyran derrière les jouets de ton fou-furieux de créateur. Aujourd’hui tu agis en solo pour la première fois, et tu paniques parce que tu ne sais pas dans quoi tu viens de mettre les pieds. Bienvenue dans la vraie vie Shiva. Tu veux que je te dise ? Sois tu restes avec moi, sois tu crèves seule ! »
Dit-il en la pointant d’un doigt accusateur.
Matt s’attendait à voir la gamine fondre sur lui à la seconde ou il aurait fini de prononcer ces mots, mais il n’en fut rien. Il ne s’était par contre pas attendu à voir un large sourire déformer le visage de la fillette à mesure où elle sentait son propres corps changer, évoluer, jusqu’à atteindre son âge standard d’une vingtaine d’année. Elle réajusta lentement ses vêtements dans un silence toujours ponctué du même sourire.
Avant qu’il ne le réalise, le jeune homme s’était retrouvé dos au sol, se faisant chevaucher par une Shiva placide qui lui tenait la gorge d’une main et menaçait d’abattre une de ses griffes mécanique dans son œil gauche de l’autre.
« C’est exactement ce que j’attendais de toi, l’original, que tu me divertisses un peu. Je te rappelle qu’il y’a environs un an et demi, lorsque tu étais encore occupé à rassembler les morceaux de ta conscience dépressive dans un coin de ma tête, j’apprenais à me débrouiller seule. Et quand je dis seule, tu sais de quoi je parle. »
Elle rétracta son bras mécanique posa sèchement son impérial postérieur sur le ventre de Matt, coupant plus ou moins volontairement la respiration de celui-ci, puis continua :
« On m’a appris très tôt à faire outre des provocations adverses, donner l’illusion d’un dialogue, obtenir des informations, avant de tôt ou tard, utiliser fatalement la force. En bref, on m’a toujours appris à faire semblant. Toi, tu es spécial pour moi. Toi, tu es le seul être humain avec qui je peux communiquer. »
Elle sourit pour elle-même.
« Même si des fois ça veut dire s’engueuler. Les autres n’ont pas ce privilège : je les éclate au moindre haussement de ton. »
Elle abattit son poing d’acier et l’enfonça profondément dans le sol, à quelques centimètres du crane de Matt. Elle approcha son visage au sourire malsain de celui du jeune homme jusqu’à ce qu’elle puisse sentir son souffle.
« Avec toi, je peux tout me permettre ! »
Matt prit appuis sur sa jambe droite et fit basculer son clone de sorte à ce qu’il se retrouve sur le dessus, avant de l’attraper par le col de son pull vert kaki.
« N’inverse pas les rôles, je ne te crains pas. Je suis déjà mort une fois après tout. C’est moi qui suis venu te proposer un plan pour sortir d’ici, à part me frapper et me menacer je ne t’ai pas vu faire grand-chose. Mais je vais être encore trop gentil et te proposer un plan : viens avec moi demain dans le désert, on doit récupérer une cargaison d’un minerai spécial et on aura assez de monnaie pour se payer un transport sans s’attirer d’ennuis. »
Shiva lui sourit : « tu as du cran, je dois bien t’accorder ça !»
Avant de lui assener un coup de genou qui l’éjecta de son emprise. La jeune femme se releva rapidement.
« Mais pour l’instant, je vais me dépêcher de t’en coller une »

Lorsqu’il rouvrit les yeux, son clone avait ré-assise son emprise sur lui, littéralement.
« Tu as tenu une minutes. » dit-elle simplement.
Il grogna, mais c’est tout ce qu’il put faire tant tous les muscles de son corps lui faisaient mal.
« Tu as tenu une minute, c’est bien. » poursuivit Shiva. Devant le gémissement de ce qu’il restait du jeune homme, elle poursuivit :
« La cargaison que tu dois récupérer doit être bien gardée, il est clair qu’ils ne t’ont pas donné une armure pour danser un ballais. C’est une petite communauté à l’abandon à ce que j’ai vu, envoyer un étranger faire le sale boulot est plutôt astucieux. Si tu te fais tuer, personne ne soupçonnera les villageois, et si tu survis ils te tueront et prétexterons avoir racheter du minerai au prochain racket.
- Pas…les villageois, juste…la forgeron » répondit l’autre dans un souffle  « elle n’est pas…comme ça.
- Alors c’est soit la plus idiote du village, soit la plus cruelle.
- Non…elle…
- Mais ouvre les yeux, pauvre con ! » dit-elle en s’appuyant un peu plus sur la cage thoracique du garçon, le faisant tousser un peu plus. « Elle voit que t’es musclé comme une serpillère autant que je le vois, mais ça ne l’a pas empêché de t’envoyer te faire tuer par une bande de bandits itinérants ! Tu vas faire quoi quand ils seront dix à t’encercler, les éblouir avec ta jolie coque toute brillante ? »

Elle regarda dans ses yeux et compris qu’elle n’arriverait pas à le convaincre, il a toujours été si borné. Elle se releva en poussant un long soupir.
« Je n’ai peut-être pas encore de plan pour le moment, c’est vrais que tout ça est trop nouveau, même si je suis sensée être parée à tout » Elle poursuivit, presque tendrement : « mais lorsque j’en conçois un, je ne mets pas ma vie sur la ligne. Pas tout de suite du moins. Si tu es si pressé de mourir vas-y. Tu n’étais pas censé être là à la base. »
Matt ne répondit pas, il ne prit même pas la peine de détourner son regard du ciel, ce qui fit reprendre à Shiva son ton cassant naturel quand elle lui tourna le dos avant de se remettre en marche.
« Tu es aussi dangereux pour toi que je ne le suis pour les autres, pauvre abrutis. »

Matt se posait encore la question quand, une bonne heure plus tard, il eut enfin la force de se relever et de se traîner jusqu’à la forge : c’était encore une entourloupe de son Shiva de montrer ses sentiments, une sorte de stratagème pour le guider dans son sens, ou c’était vraiment de la compassion ?  Pourquoi se préoccuper de lui maintenant ? Où était son intérêt ? Il y avait-il  vraiment un plan derrière ses belles paroles et ses coups de colère ?
Quand Nelyn ouvrit la vieille et lourde porte d’entrée de la forge, elle ne dit rien à propos de l’état du jeune homme. Elle se contenta de le laisser entrer et de l’aider à ôter l’armure.
« Je vois que tu mets déjà à profit ton salaire, t’as fait quoi avec, une sorte de test de l’extrême pour savoir si la forge de Tarem produit toujours des armures à la hauteur de leur réputation ?
- Non pas vraiment » répondit le jeune homme en tendant le plastron de l’armure « mais on peut dire que j’ai eu ma dose d’extrême oui.
- C’est intéressant ces marques que je vois là. C’est quoi, des impacts de balles ? » Demanda-t-elle en passant ses mains sur quatre enfoncement  parallèles et assez profond, qui dessinaient comme une marque de griffure à l’endroit où l’alliage avait visiblement le plus souffert.
- « C’est un coup de poing. De ma sœur. »
Nelyn prit deux secondes pour confirmer qu’elle avait bien entendu.
« Un… coup de poing… de ta… petite sœur ? »
Inclinaison de tête de la part de Matt
« Merde, elle a de la poigne la morveuse !
- Une poigne de fer, oui… »
Nelyn invita Matt à diner, qui se passa calmement. Le jeune homme essayant d’en dire le moins possible sur lui et de relancer la forgeron sur l’histoire de la forge. Quand enfin elle l’invita à dormir dans une petite pièce à part, il ne trouva pas la paix, les paroles de Shiva revenaient sans cesse par bribes. Il était comme hanté, et si elle avait raison ? Pouvait-il vraiment se permettre d’aller au casse-pipe sur une simple demande, à peine deux jours après avoir retrouvé un semblant de vie ? Il ne savait même pas comment survivre lui-même, encore moins comment gérer son clone pour éviter un bain de sang toute les cinq minutes, il ne pouvait pas sauver le monde c’est certain.
Quand il parvient enfin à calmer la machine à supposition et trouver un début de sommeil, il fut alerté par le son du craquement de bois juste au-dessus de sa tête. Levant les yeux, il distingua une forme dans le noir, qui, se sachant repérée, ne tarda pas à descendre à son niveau d’un bref bond. Intrigué sans bizarrement se sentir menacé au vue du contexte, Matt éclaira fébrilement la pièce d’une petite sphère turquoise incandescente.
«Tu fais chier, moi qui ne voulait pas que tu me voie pas comme ça. » Dit une voix infantile étrangement familière à mesure que la forme s’approcha de la lumière pour se révéler être Shiva dans un corps d’enfant une fois de plus. Toutefois quelques choses semblait différente, elle semblait encore plus jeune et avait visiblement l’air exténuée.
« Tu reviens me faire la morale ? Laisse-moi dormir veux-tu, même les suicidaires ont besoin de sommeil tu sais. » Rétorqua Matt, qui, se sentant en position de force, ne manqua pas d’en profiter.
« J’ai dit ce que j’avais à te dire, maintenant va te faire one-shot si tu en as vraiment envie, je ne suis pas ta mère. » Dit l’enfant en enlevant les chaussures devenue bien trop grandes pour elle, avant de s’installer dans les draps et se coller contre Matt qui n’avait visiblement pas le choix.
« Il t’arrive quoi ? » demanda-t-il
« Je suis exténuée, je n’arrive pas à dormir depuis qu’on est arrivée dans le désert. C’est trop …silencieux.
- Silencieux ?
- Avant d’arriver ici, je vous avais toujours toi et Lisa dans un coin de ma tête. Maintenant c’est le silence complet… ce n’est pas dérangeant en journée, mais ça m’empêche de dormir. Je n’ai pas l’habitude du vide. » Dit-elle en logeant sa tête contre la poitrine de son autre pour entendre les battements de son cœur.
- Tu parles d’un conquérant. » ironisa Matt avant de se rendre compte que son clone dormait déjà.
Trop fatigué lui-même pour se poser plus de questions, il tomba dans un sommeil profond.

Qui fut interrompu par un vacarme sourd de murs qu’on frappe, et d’une bouteille qui se brise.
« Tout est de ta faute ! » Beugla un homme ivre.
Matt se leva d’un bond et constata tout de suite que Shiva n’était plus là, sans attendre il enfila ses vêtements et sorti de la chambre.
Nelyn avait enfilé ses vêtements à la va-vite et faisait face à un homme faisant facilement deux fois sa taille, autant en largeur qu’en taille.
« Koyle, rentre chez toi. Tu es ivre, encore. » Répondit-elle fermement.
- « Ferme là ! » répondit l’autre en sortant une nouvelle bouteille de la sacoche qu’il tenait en bardât. « J’aurai du hériter de la forge. Mais le vieux n’en a fait qu’à sa tête, et il a choisi une petite bâtarde incapable de magie pour diriger l’entreprise. Résultat : on est ruiné. » Dit-il avant d’avaler rapidement quelque gorgées de plus d’alcool.
Matt s’approcha doucement de Nelyn « Il y un problème, c’est qui lui ? »
« Koyle, un cousin. Et un ancien travailleur de la forge » répondit Nelyn.
Koyle s’approcha en titubant, l’air agacé « comme si je pouvais me vanter de faire partie de la même famille d’une pièce rapportée comme toi, gamine. C’est qui le gringalet, Nelyn ? Je croyais que tu étais trop occupé à dilapider not’ fric dans tes jouets pour fricoter ?
- Je te présente Matt, il va nous aider à récupérer notre stock de magilite. Maintenant va te coucher Koyle, t’as pas les idées claires. » Répondit la jeune femme visiblement agacée.
- « Ha ! tu veux envoyer cette lavette contre les bandits des sables, t’es encore plus conne que je ne le pensais ma parole. Même moi et mes gars on ne s’y risque pas. »
« C’est vrais que vous êtes plus occupés à vous saouler dans votre rad miteux » siffla Matt entre ses dents. Il s’avança dans l’espoir de calmer la situation« Ecoute Koyle, ta cousine me fait confiance, demain je vais récupérer les magilites et la forge de Tarem fonctionnera à nouveau.
- Dégages moucheron ! Vous commencez à me faire vraiment chier tous les deux » Dit-il en faisant apparaitre du feu entre ses doigts. « Je vais vous montrer ce que c’est le feu d’un vrai forgeron !
- Koyle non ! » hurla Nelyn.
Mais il était trop tard, d’un geste ample, l’homme abattit les flammes sur Nelyn qui fut sauvée juste à temps par Matt, qui dans un réflexe fit apparaitre un bouclier magique de la paume de ses deux mains. Les flammes furent soufflées et virent lécher les poutres en bois de la forge qui s’enflammèrent aussitôt.
L’incendie gagna rapidement en intensité, en l’espace de quelques secondes, une majeure partie de la forge fut en proie aux flammes.
« Bordel ! » jura Koyle avant de prendre la fuite
Matt mis sa manche devant son visage pour ne pas s’étouffer, avant de chercher Nelyn qui se trouvait dans un état de panique.
« Ma forge, mes recherche ! Je dois les récupérer ! » Dit-elle en essayant de monter les escaliers qui menaient vers la salle principale, en proie à un brasier infernal.
-« On n’a pas le temps, il faut partir ! » beugla Matt en agrippant la jeune femme pour l’emmener vers la sortie.
Arrivé dehors en sécurité, Nelyn vit tout ce pourquoi elle se battait partir en cendre : de longues flammes s’échappaient déjà par les fenêtres, ne laissant aucun doute sur la destruction totale de son travail.
« Je n’ai…plus rien » dit-elle, en état de choc. A bout de force, elle se laissa tomber à genoux avant de laisser son corps se convulser de longs sanglots.
Matt était totalement pris au dépourvu, que fallait-il dire, ou faire ? Il s’assied à côté de la jeune forgeron.
« Nelyn, ce ne sont que quelques briques. Tout peut être reconstruit. » Dit-il.
- « Non, sans matériel, je ne pourrais jamais réaliser les rêves de mon père. Je n’ai plus qu’à quitter la ville, ça devait arriver de toute façon, je ne suis qu’une idiote. » sanglota-t-elle
Incapable de répondre, Matt se releva et marcha en direction du désert. Résolu. Il pouvait toujours faire quelque chose, il pouvait récupérer les magilites. L’incendie dans son dos lui renvoyait son ombre, elle était bien frêle en effet, mais elle était là. Il serra les poings, s’il vivait, s’il se tenait encore debout après tout ce qui lui était arrivé, alors il était capable de tout.
« Tu vas encore vouloir sauver la veuve et l’orphelin ? » ironisa la voix de Shiva.
Il releva la tête, son clone se tenait bien là, dans sa forme adulte, avec un peu de suie sur le visage et sentant légèrement le fumé, mais plus incisive que jamais. Elle jeta à ses pieds son armure, ses jambières et son arme.
« Je t’accompagne, tu vas te faire trucider sinon. »
Matt soupira, amusé. « Qu’est-ce qu’il t’arrive, tu t’attendris maintenant ? » dit-il en enfilant son équipement
- « faut pas que tu clamses maintenant, j’ai besoin de toi pour dormir. Je ne peux pas conquérir ce monde sinon.
- Mais bien sur… »
Les deux se mirent en marche en direction du sud, le campement des bandits était à deux heures de marche. Ils attaqueraient au petit matin.

à suivre.
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